A. Les hadiths concernés :
A-1. " Point de mariage sans tuteur " ( Ahmad, abu Dawud, Tirmidhi ) .
Il y a des manipulations dans la chaîne de transmission de ce hadith d'abu Musa. Le hadith a été rejeté par les spécialistes dont Dahlewi. Le hadith selon Aïcha ("un mariage sans tuteur est nul, nul, nul") est également faible car Zuhri a nié avoir transmis cela de Aïcha. La transmission de ce hadith via Ismail ibn Ibrahim ibn Jurayj est de même rejetée car celui-ci n'est pas fiable. Il est intéressant que pour les garçons, l'expression "pas de mariage sans tuteur" n'est nullement tenu comme nécessaire. Cela prouve clairement que ce hadith n'est pas authentique.
A-2. " La femme thayyib est plus en droit sur elle-même que son tuteur, quant à la bikr son accord est recquis, et cet accord est son silence. "
* Le sens du terme thayyib a été discuté. Souvent il est interprété comme "déjà mariée au par avant (mais séparée ou veuve)", mais cela ne fait pas l'unanimité.
Thayyib
désigne ainsi un nuage, la pluie, ou ce qui s'écoule vers le bas (thawb). Ainsi, la fille mature dont les seins sont prêts à allaiter et qui est prête à la reproduction (menstruations) devient thayyib. Quant au terme bikr il désigne la personne n'apportant aucun avantage reproductif. En effet, à l'époque il était rare pour une fille de se marier à un âge avancé, et les filles physiquement matures mais n'ayant pas encore de règles étaient mariées, en sorte que trouver une fille fertile vierge après l'âge de 13 ou 15 ans était chose exceptionelle. Ainsi, le terme
thayyib
a acquis dans l'usage le sens de la fille ayant déjà contracté un mariage.
A-3. " Une jeune femme du nom de Hansaa vint chez le Prophète lui dire : "Mon père souhaite me marier avec un cousin fortuné pour s'ennoblir ". Le Prophète lui autorisa à rompre ce mariage forcé. Et la jeune femme dit : " J'ai juste voulu montrer que les tuteurs n'ont pas de droit, je vais accepter le choix de mon père ". (ibn Maja)
Suivant une autre variante, elle a épousé un autre garçon qu'elle désirait épouser.
Suivant une autre variante, elle a épousé un autre garçon qu'elle désirait épouser.
B. Dans le Coran :
B-1. (33-50) : " Ô Prophète! Nous t’avons rendu licites tes épouses à qui tu as donné leur mahr (dot), ce que tu as possédé légalement parmi les captives [ou esclaves] qu’Allah t’a destinées, les filles de ton oncle paternel, les filles de tes tantes paternelles, les filles de ton oncle maternel, et les filles de tes tantes maternelles, - celles qui avaient émigré en ta compagnie -, ainsi que toute femme croyante si elle fait don de sa personne au Prophète sans dot, pourvu que le Prophète consente à se marier avec elle: c’est là un privilège pour toi, à l’exclusion des autres croyants. Nous savons certes, ce que Nous leur avons imposé au sujet de leurs épouses et des esclaves qu’ils possèdent, afin qu’il n’y eût donc point de blâme contre toi. Allah est Pardonneur et Miséricordieux. "
* Dans ce passage, nous lisons qu'une femme peut proposer le mariage à un homme. Cela est une preuve formelle du droit au mariage sans tuteur d'une femme, et ce verset n'évoque ni vierge, ni veuve. La dot seule est ici levée pour le Prophète auquel les dames feront une demande en mariage.
B-2. (2:232) : " Et quand vous divorcez d’avec vos épouses, et que leur délai expire, alors ne les empêchez pas de renouer avec leurs époux, s’ils s’agréent l’un l’autre, et conformément à la bienséance. Voilà à quoi est exhorté celui d’entre vous qui croit en Allah et au Jour dernier. Ceci est plus décent et plus pur pour vous. Et Allah sait, alors que vous ne savez pas. "
* Ce verset interdit au tuteur de contrevenir au mariage de la femme divorcée avec son ex-mari.
C. Les sens des termes thayyib et bikr :
D'après abu Hanifa, thayyib désigne la maturité de la personne mariée ou non, à choisir son époux. Etymologiquement, cela signale l'écoulement, ce qui s'écoule par abondance. Ce mot est utilisé pour le nuage prêt à pleuvoir. Ainsi on comprend : "les menstrues de la fille pubère et sa poitrine prête à l'allaitement". (Dans une variante d'un hadith nous lisons thayyib al-zani, qui vient par les autres chaînes comme muhsan, cela est un lapsus car muhsan signifie "une personne ayant déjà bénéficié" de la racine ihsan et l'usage du terme thayyib est erroné.) Selon le rite hanafiste, l'accord du tuteur est vivement conseillé mais n'est pas considéré comme impératif. Néanmoins, l'accord du tuteur de la fille prépubère physiquement mature est nécessaire. Si la fille insiste à se marier malgré son tuteur, elle a droit au recours chez un juge.
Le terme bikr (بكر), vient etymologiquement, de l'union des termes be-kâr en syriaque passés à l'arabe (>> n'apportant aucun bénéfice). Autrfois, les jeunes étaient mariés très précossement. Généralement, une jeune femme était mariée très jeune. Ainsi le terme bikr a acquis le sens de "vierge". Autrement, le terme bikr signifiait l'idée de la personne non prête à se reproduire. À contrario, le terme thayyib désignait la fille apte à se reproduire.
Il est plausible que le terme thayyib désignait de façon imagée la jeune femme ayant une poitrine et devenue fertile. Le mot thayyib signifiant l'idée d'écoulement : évoquant le lait ou les règles. La diachronie dirigeant la dérive sémantique des termes bikr et thayyib explique les divergences des quatres écoles quant à l'obligation ou non de l'accord d'un tuteur pour le mariage des jeunes dames.
E. Deux des quatre écoles canoniques n'exigent pas un tuteur impérativement :
Le rite hanafiste considère l'autorisation parentale comme non obligatoire. Cela est en effet considéré comme préférable par abu Hanifa. Ce qui est un peu moins connu est que selon un des avis du rite malékite aussi, l'accord d'un tuteur pour la vierge n'est pas tenu pour une condition de la validité du mariage si la fille n'est pas très versée dans la religion. Ces avis corroborent que les exigences sur ce point ne se fondent pas sur une preuve catégorique, mais sur une inquiétude sur le choix de la jeune fille, sans que cela ne soit exigé de l'autorité ultime du Prophète.
F. Conclusions :
La nécessité de l'acord du tuteur qui est une pratique bien entérinée dans la pratique, ne constitue pas une règle formelle instituée par le Coran ou le Prophète. Il n'existe en effet aucun hadith imposant cette règle qui n'ait été critiqué par des spécialistes du hadith. L'approche la plus pertinente à ce sujet est celle d'abu Hanifa. En effet, une femme mature est plus amème à savoir ce qu'elle veut. De fait, l'accord du tuteur pour les plus jeunes est très sage. Toutefois, l'opposition à son mariage peut inciter à la fornication. Une jeune femme doit être en droit de se marier avec la personne de son choix, qu'elle ait ou non déjà contracté un mariage auparavant. Deux des quatre écoles imposent cet accord comme une règle obligatoire. Néanmoins, dans les quatre écoles une fille vierge dont le tuteur reffuse le mariage peut invoquer en justice de se marier néanmoins en conformité au rite hanafite.
Il faut dans tous les cas veiller à annoncer le mariage par une fête dans les états islamiques régis par la charia, afin d'éviter l'accusation de fornication.
Il faut dans tous les cas veiller à annoncer le mariage par une fête dans les états islamiques régis par la charia, afin d'éviter l'accusation de fornication.
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